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St. John Lucas, comp. (1879–1934). The Oxford Book of French Verse. 1920.

Olivier de Magny ?–†1560

108. ‘Mon Castin, quand j’aperçois’

MON Castin, quand j’aperçois

Ces grands arbres dans ces bois

Dépouillés de leur parure,

Je rêvasse à la verdure

Qui ne dure que six mois.

Puis, je pense à nostre vie

Si malement asservie,

Qu’el’ n’a presque le loisir

De choisir quelque plaisir,

Qu’elle ne nous soit ravie.

Nous semblons à l’arbre verd

Qui demeure, un temps, couvert

De mainte feuille naïve,

Puis, dès que l’hiver arrive,

Toutes ses feuilles il perd.

Ce pendant que la jeunesse

Nous repand de sa richesse,

Tousjours gais, nous florissons;

Mais soudain nous flétrissons,

Assaillis de la vieillesse.

Car ce vieil faucheur, le Tems,

Qui devore ses enfans,

Ayant ailé nos années,

Les fait voler empennées

Plus tost que les mesmes vents.

Doncques, tandis que nous sommes,

Mon Castin, entre les hommes,

N’ayons que notre aise cher,

Sans aller là haut chercher

Tant de feux et tant d’atomes.

Quelque fois il faut mourir,

Et si quelqu’un peut guerir

Quelque fois de quelque peine,

Enfin son attente vaine

Ne sait plus où recourir.

L’esperance est trop mauvaise,

Allons doncques sous la braise

Cacher ces marons si beaux,

Et de ces bons vins nouveaux

Appaisons notre mésaise.

Aisant ainsi notre cœur,

Le petit archer vainqueur

Nous viendra dans la memoire;

Car, sans le manger et boire,

Son trait n’a point de vigueur.

Puis, avecq’ nos nymphes gayes,

Nous irons guerir les playes

Qu’il nous fit dedans le flanc,

Lorsqu’au bord de cet estang

Nous dansions en ces saulayes.