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St. John Lucas, comp. (1879–1934). The Oxford Book of French Verse. 1920.

Pierre-Jean de Béranger 1780–†1857

215. Roger Bontemps

AUX gens atrabilaires

Pour exemple donné,

En un temps de misères

Roger Bontemps est né.

Vivre obscur à sa guise,

Narguer les mécontents;

Eh gai! c’est la devise

Du gros Roger Bontemps.

Du chapeau de son père

Coiffé dans les grands jours,

De roses ou de lierre

Le rajeunir toujours;

Mettre un manteau de bure,

Vieil ami de vingt ans;

Eh gai! c’est la parure

Du gros Roger Bontemps.

Posséder dans sa hutte

Une table, un vieux lit,

Des cartes, une fiûte,

Un broc que Dieu remplit.

Un portrait de maîtresse,

Un coffre et rien dedans;

Eh gai! c’est la richesse

Du gros Roger Bontemps.

Aux enfants de la ville

Montrer de petits jeux;

Être un faiseur habile

De contes graveleux:

Ne parler que de danse

Et d’almanachs chantants;

Eh gai! c’est la science

Du gros Roger Bontemps.

Faute de vin d’élite,

Sabler ceux du canton;

Préférer Marguerite

Aux dames du grand ton;

De joie et de tendresse

Remplir tous ses instants;

Eh gai! c’est la sagesse

Du gros Roger Bontemps.

Dire au Ciel: Je me fie,

Mon Père, à ta gonté

De ma philosophie

Pardonne la gaîté;

Que ma saison dernière

Soit encore un printemps;

Eh gai! c’est la prière

Du gros Roger Bontemps.

Vous, pauvres pleins d’envie,

Vous, riches désireux,

Vous, dont le char dévie

Après un cours heureux;

Vous, qui perdrez peut-être

Des titres éclatants,

Eh gai! prenez pour maître

Le gros Roger Bontemps.